Travailleurs détachés Sept pays européens appellent à une meilleure protection
Huit ministres de sept pays de l’UE, dont la France, ont cosigné une tribune, publiée lundi par le quotidien Le Monde, appelant à mieux protéger les travailleurs détachés en Europe, notamment en leur accordant une rémunération équivalente à celle des travailleurs du pays d’accueil dès le premier jour de leur détachement.
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« Nous sommes attachés au projet européen, à ses réalisations et notamment aux grandes libertés de circuler au sein de l’Union », écrivent-ils en préambule de la tribune. « C’est pourquoi nous voulons le préserver et lui redonner tout son sens, celui d’un réel espace de prospérité et de liberté pour 500 millions d’Européens ». « Pour y parvenir, il nous faut renforcer nettement la dimension sociale de ce marché intérieur », expliquent les ministres du Travail française Myriam El Khomri, allemande Andrea Nahles, et leurs homologues de la Belgique, du Luxembourg, des Pays-Bas, de l’Autriche et de la Suède, qui prônent une « convergence sociale vers le haut. »
« Traitement digne et équitable des travailleurs et liberté de circulation ne peuvent pas être considérés comme antagonistes. La liberté de circuler ne doit pas être la liberté d’exploiter », insistent-ils, en appelant à l’adoption de la directive révisée de 1996 sur le détachement de travailleurs. Les huit ministres (dont deux pour la Belgique) estiment que « les travailleurs détachés doivent pouvoir bénéficier de conditions de vie et de travail décentes et d’une rémunération équivalente à celle des travailleurs du pays d’accueil dès le premier jour de leur détachement ». Ils réclament aussi « une concurrence loyale entre les entreprises européennes ». Les signataires s’en prennent particulièrement aux « sociétés boîtes aux lettres qui se créent avec pour seule raison sociale de profiter des écarts de coûts salariaux entre les pays de l’Union européenne ».
11 pays contre la proposition de la Commission
La directive révisée, proposée en mars par la Commission européenne, vise à aligner les conditions des travailleurs détachés, souvent employés dans le bâtiment, les abattoirs ou l’agriculture, sur celles des travailleurs locaux. Elle s’est heurtée au refus de onze pays, en majorité de l’Europe de l’Est (Bulgarie, Hongrie, Croatie, République tchèque, Pologne, Estonie, Roumanie, Lituanie, Lettonie, Slovaquie ainsi que le Danemark), qui ont appliqué la procédure européenne du « carton jaune », obligeant la Commission européenne à revoir sa copie. Celle-ci a décidé de faire fi de ces objections et de maintenir sa proposition.
Il faudra désormais l’aval du Parlement européen et du Conseil des 28 ministres de l’UE chargés des questions sociales et de l’emploi pour que la directive révisée soit adoptée. « Cette réforme ambitieuse […] nécessitera une compréhension mutuelle de nos positions et de nos préoccupations », et il faudra pour cela « travailler de concert, à 28 », reconnaissent les signataires de la tribune.
La France, pays d’accueil et d’origine des travailleurs détachés
En octobre, Mmes El Khomri et Nahles se sont rencontrées à Paris sur le sujet et ont appelé à la création, au niveau européen, d’une base de données unique recensant les travailleurs détachés légaux afin de lutter contre les fraudes. Myriam El Khomri s’est également rendue en Pologne pour tenter de sensibiliser le gouvernement polonais à la nécessité de combattre les sociétés boîte aux lettres, mais avait reconnu des « divergences » à ce sujet. La France et l’Allemagne sont, avec la Belgique, parmi les principaux pays d’accueil de travailleurs détachés. Elles sont aussi, aux côtés de la Pologne, parmi les principaux pays d’origine.
AFP
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